Isabelle Amonou
L’enfant rivière
Nathan a disparu il y a 6 ans. Il n’a fallu qu’un bref instant. Zoé, sa mère, occupée à repeindre la coque d’un bateau, n’a rien vu. On a cherché, fouillé, interrogé, dragué les cours d’eau, puis résigné.
Sauf Zoé.
La rivière n’ayant pas recraché le corps de Nathan, elle est persuadée que son fils est en vie. Alors, quelques années plus tard, elle continue de le chercher parmi les migrants mineurs qui débarquent au Canada en provenance des USA, poussés par la crise climatique et ses conséquences, ceux qui se cachent dans les bois pour éviter les camps d’internement.
Armée de ses fléchettes tranquillisantes, véritable amazone des temps modernes, elle arpente la forêt telle une ombre, l’espoir en bandoulière.
Isabelle Amonou, bretonne, campe son roman dans les confins du Canada, au sein d’une nature duelle, entre crainte et magnificence. Elle nous parle d’une culture qui pourrait être sienne tant elle la transmet avec passion.
Nous sommes quelques années après le Covid, le réchauffement de la planète s’est accentué, les premiers migrants climatiques dont nous parlons aujourd’hui font leur apparition. Criant et effrayant de justesse.
Dans ce contexte instable, Zoé, fille mi-autochtone mi-colon, et Thomas, intellectuel parisien, vivent la plus innommables des tragédies : la perte d’un enfant.
Pas de corps, pas de deuil, deux individualités que le chagrin n’unit pas mais déchire.
Fabuleuse découverte que ce roman captivant, cette presque-dystopie qui aborde nombreuses thématiques : deuil, transmission transgénérationnelle, héritages ancestraux vs « modernité », géopolitique, crainte de l’étranger…
Un roman plutôt noir dans lequel la disparition de l’enfant soulève des questions profondes, fait ressurgir un passé historique peu glorieux : le traitement des autochtones. La tension ne cesse de croître pour un dénouement pour le moins surprenant.
Si le récit entier m’a portée, j’ai peine à comprendre la chute un peu rapide, qui me laisse sur ma faim. Je referme le roman avec l’envie que surgisse une suite. Comme une petite frustration qui persiste.